lundi 22 février 2010

Au ban, aux bancs (Part II)

Il est intéressant d'observer la diversité des éventuelles réactions.
Dans ce matin calme, la séance peut n'être troublée que par la caresse du vent, la fesseuse et le fessé, seuls et unis dans le silence, partagent intensement ce moment. Ils peuvent, grisés par l'immensité des possibles, continuer cette belle journée par une deuxième correction.
Il peut y avoir aussi le passage discret et légèrement amusé d'un couple de promeneurs. Des gens d'un certain âge, qui ont écouté Brassens et qui savent que les bancs publics et la fessée se rejoignent dans le même répertoire. Peut-être esquissent-ils juste un petit clin d'oeil, adressé autant à nous qu'aux souvenirs de leur belle et folle jeunesse.
Et puis on remarque ce joggueur un peu trop pressé qui augmente son rythme, réajuste son circuit pour passer un peu plus de nous, sans avoir l'air d'y toucher.
Oublions l'inévitable empêcheur de fesser en rond, qui s'approche, fait la morale, s'insurge et menace d'appeler le gardien. On le laisse s'agiter tout seul, il s'éloigne en pestant, et on pense que le gardien en question, encore au lit, à d'autres chats à fouetter.
Il nous faut un moment pour indentifier cette assise, au loin, cachée derrière un journal du soir, qu'elle lit de la première à la dernière page. Personnage hitchcockien de la scène, mystérieux, qui insensiblement, de banc en banc, se rapproche et soulève par intermittences le canard. Elle finit brusquement, comme tous les grands timides, par s'approcher d'un banc et nous déclarer sa passion pour ce que nous faisons. Un physique à "La discrète", une tenue sobre, sans âge. Elle se présente, prof de philo à l'université voisine, spécialiste de Freud, Deleuze et Derrida ; elle veut déconstruire notre expérience, l'examiner à la loupe pour les besoins d'un article. C'est la gloire assurée dans une revue confidentielle. Nous lui proposons de recommencer, enfin "nous", elle accepte, enthousiaste, sort son carnet de notes et s'assit en tailleur sur le banc juste en face. Ah servir la science...
Debriefing, critique dans le bistrot du coin autour d'un petit serré. Je sens la moleskine. Il faut que je change de jogging...

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Fessé -ou, mieux encore, fouetté- en plein air.. le pied! La cambrousse a cela de bien: il y a toujours dans les fourrés de quoi fustiger son homme! J'en ai fait bien des fois l'expérience -mais jamais, je l'avoue, au bord d'un chemin de campagne!

e (bis)

M. et e. a dit…

Il est des campagnes plus ou moins tranquilles, mieux faut éviter en effet de croiser une moissonneuse-batteuse...;-)